Après deux ans de procédure, la justice autorise un couple de Saint-Vit à prénommer sa fille Cancoillotte.
Théo et Cyntia Allaye n’y croyaient plus. Après deux ans d’un parcours administratif et juridique interminable, ces deux jeunes parents peuvent enfin appeler leur enfant avec le prénom de leur choix, sans craindre que la justice ne les oblige à en changer. La Cour d’Appel de Besançon vient en effet de valider le prénom qu’un précédent jugement leur avait refusé.
Retour en janvier 2013 : les Allaye viennent de donner naissance à une petite fille qu’ils choisissent de prénommer… Cancoillotte.
« Parce qu’on est attachée à notre région et à sa gastronomie », raconte Cyntia. « Et puis aussi parce qu’on trouvait ça jolie pour une petite fille de s’appeler comme ça ».
Mais lorsque le père de l’enfant se rend à la mairie de Saint-Vit pour déclarer sa naissance, l’employé de l’état civil se montre réticent. « Il a dit qu’un nom de fromage ça ne passerait pas et qu’on ferait mieux de choisir un prénom normal », se souvient Théo. « J’ai répondu qu’on avait fait notre choix et qu’il n’était pas question d’en changer »
Un prénom contraire à l’intérêt de l’enfant
Deux semaines plus tard, Théo et Cyntia Allaye reçoivent une convocation au tribunal de Besançon. Là, on leur signifie l’annulation pure et simple du prénom Cancoillotte. « En l’espèce, argumente la notification du jugement, le prénom « Cancoillotte » donné à l’enfant correspond au nom d’une spécialité fromagère. Or il est contraire à l’intérêt de l’enfant d’être affublé d’un tel prénom qui ne peut qu’entraîner des moqueries ou des réflexions désobligeantes. »
Pour les Allaye, il est possible de faire appel, mais on les prévient : les délais sont très longs. Tant pis, il n’est pas question pour Théo et Cyntia d’accepter cette décision qu’ils jugent injuste et incompréhensible. Ils décident donc de retourner devant le tribunal. Il leur faudra alors attendre plus de deux années. Une éternité durant laquelle ils n’osent pas prénommer leur fille Cancoillotte, de peur qu’elle s’y habitue et que son prénom soit définitivement invalidé. « On l’a appelée Yoyotte pendant deux ans », explique Cyntia. « On s’est dit que si on perdait, on la prénommerait Échalotte ».
Un précédent historique
Maître Fabrice Renard, l’avocat du couple, explique l’argument juridique qui a finalement convaincu le tribunal :
« On a expliqué à mes clients que donner un nom de fromage à un enfant ne se faisait pas. J’ai démontré au tribunal qu’il y avait eu un précédent et pas des moindres : Richard 1er d’Angleterre, né en France en 1189. Un souverain que l’on nomme aujourd’hui encore « Richard Coeur de Lion » dans tous les livres d’Histoire. Si un homme − fut-il roi − a pu s’inscrire aussi positivement dans l’Histoire alors qu’il portait le nom d’un Camembert, rien ne justifie qu’une petite fille n’ait pas le droit de se prénommer Cancoillotte ».
Convaincu par les arguments de Maître Renard, le tribunal administratif a définitivement lâché son fromage et a accordé à la petite Allaye, le droit de se prénommer Cancoillotte.
Gageons que ce prénom qui évoque si joliment notre riche terroir gastronomique, saura rencontrer un vif et légitime succès auprès des futurs parents francs-comtois.